Privés d'odeurs, ils ré-éduqueront leur nez - Article traduit de l'Est Républicain, France. Auteur : Stephanie Cheffer Stephanie Cheffer
Atteints par le nouveau Coronavirus, ils s'en sont sortis mais vivent désormais sans rien sentir, ou presque : devenus partiellement ou totalement anosmiques, ces anciens malades suivent un protocole innovant de rééducation olfactive, mis en place au CHRU de Nancy.
Ils ont échappé au pire, se sont remis du Sars-CoV 2, mais leur vie est désormais beaucoup plus terne. L'infection virale ayant provoqué une inflammation des voies respiratoires supérieures et détruit tout ou partie des cellules olfactives, ces victimes du nouveau coronavirus ont été privées de leur capacité à sentir les odeurs. Et cette disparition - souvent très brutale - de l'odorat, signe d'alerte ou symptôme de la maladie installée, persiste après la rémission.
Les demandes de prise en charge de l'anosmie s'étant multipliées dans ce contexte de crise, le CHRU de Nancy vient de lancer, par l'intermédiaire de son service "oto-rhino-laryngologie et chirurgie de la tête et du cou", un nouveau protocole de rééducation olfactive intensive : matin et soir pendant huit mois, les patients doivent inhaler huit parfums (10 secondes chacun, avec 30 secondes à une minute d'intervalle), des parfums sous forme de billes enfermées dans de petits tubes.
La rééducation olfactive étant développée en Allemagne ou en Belgique mais très peu en France, le service de Nancy s'est appuyé sur les quatre senteurs de base utilisées par nos voisins (rose, eucalyptus, girofle et citron) et y a ajouté quatre senteurs. (fraise, herbe coupée, lavande et épicéa) propres à stimuler les cellules olfactives.
"L'objectif est d'évaluer l'effet de cette rééducation accélérée sur le retour à la normale", résume le Dr Duc Trung Nguyen, qui a mis au point ce kit odeur avec le laboratoire Inhalio de Saint-Malo [Keith Kelsen, CEO, Inhalio / Yves Cotarmanac'h, COO, Inhalio].
"Je peux renifler mes flacons de parfum..."
Après un premier diagnostic basé sur la respiration de bâtonnets odorants et visant à mesurer le degré de perte d'odorat, puis une endoscopie nasale, afin d'éliminer toute autre cause, chaque participant passe ensuite quelques jours sous corticostéroïdes (non prescrits aux patients pendant la crise, ils permettent de réduire l'inflammation) avant la phase de rééducation proprement dite, à domicile.
"J'espère vraiment que cela va améliorer les choses", soupire Ophélie, qui a perdu l'odorat le 27 mars dernier. "A la maison, j'ai beau renifler mes flacons de parfum, les produits ménagers, les aliments, je ne sens plus rien ! A la longue, c'est très perturbant", avoue cette habitante de Damelevières. "Je sais parfois si ça sent bon ou mauvais, mais je ne sais pas ce que c'est, d'où ça vient.
"Comme les autres, elle perçoit les goûts (sucré, salé, amer...) en mangeant, mais c'est tout. "Au début, sourit Pauline, je mangeais tout à la moutarde : au moins, ça piquait ! J'essaie de me concentrer sur les textures, ou les épices. La jeune femme de 28 ans s'accroche aussi à cette rééducation pour retrouver ses sensations olfactives, perdues du jour au lendemain, à la mi-mars. "Le pire, c'est qu'avant, j'avais un très bon odorat, je pouvais reconnaître un vin au nez..." Comme elle, ils devraient être 80 anosmiques et "ex Covid" pour suivre ce protocole. Pour renouer enfin avec les odeurs, et une vie pleine de saveurs.
Auteur : Stephanie Cheffer pour l'Est Republicain, France. Dimanche 25 octobre 2020 Article publié : https://www.estrepublicain.fr/sante/2020/10/25/prives-d-odeurs-ils-vont-reeduquer-leur-nez
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